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Frédéric Martin - Engagement politique et citoyen
18 juillet 2016

Réflexions sur la situation en France après l'attentat de Nice

[NB : ce texte a été publié le 18 juillet 2016, avant l'assassinat du père Jacques Hamel en l'église de Saint-Etienne-du-Rouvray]

 

Chers amis,

Les événements récents, depuis l’attentat perpétré à Nice jeudi soir, appellent quelques réflexions de ma part, que je souhaite partager avec vous. Elles n’engagent que moi.

A l’heure où notre pays est une nouvelle fois confronté à l’horreur d’un attentat d’une extrême sauvagerie, les citoyens que nous sommes attendent un comportement digne de la part des journalistes et des responsables politiques. Les premiers ont sombré dans le sensationnalisme et l’indécence, les seconds ont préféré la querelle des partis à l’unité nationale, pourtant requise en des circonstances si graves. La polémique et la surenchère ne répondent en rien à nos questions, mais ajoutent au désarroi et à l’angoisse d’un pays qui s’installe durablement dans un régime de terreur. Honte à ceux qui emploient leur intelligence à conserver ou conquérir le pouvoir, au lieu de l’utiliser à cette seule fin légitime : la sauvegarde de l’intérêt national.

Ce que j’observe également, c’est que les mesures adoptées ou discutées ne concernent que la sécurité des personnes à court terme. Certes, il est de la responsabilité de l’Etat de protéger ses citoyens. Le rapport Fenech/Pietrasanta apporte d'intéressantes recommandations sur le plan technique et qui seraient de nature à favoriser l'efficacité de la lutte immédiate contre le terrorisme. Mais contre des ennemis qui ne craignent pas la mort, et la recherchent même, quels moyens pourraient nous garantir une sûreté absolue ? La réponse sécuritaire ne suffira pas à gagner cette guerre-là. La première question à se poser, la plus complexe aussi, c’est comment et pourquoi de jeunes Français en viennent à haïr la France et à se rendre perméables à une idéologie mortifère. 2 000 jeunes Français sont partis faire le Djihad en Syrie. Qu’est-ce que cela signifie ? De quoi est-ce révélateur ? Le temps perdu au début de l’année sur la question de la déchéance de nationalité pour les binationaux aurait pu être employé à analyser les raisons de ce phénomène. L’ennemi recrute chez nous, le serpent couve dans notre sein. Cette réalité est dure à accepter car elle nous fait mal.

Ce nombre de 2 000 jeunes apprentis djihadistes fait froid dans le dos. Ils tournent le dos à la France et rejettent les valeurs dont elle est porteuse. Les raisons en sont nombreuses, comme le montre le Rapport « Génération radicale » de Malek Boutih, dont tous les enseignements n'ont pas encore été tirés. Mais c’est aussi la conséquence de toute une série de renoncements, qui, depuis 40 ans, ont conduit à la situation actuelle.

Ces renoncements, ils se sont faits à l’école, où rien n'est fait pour soutenir l’autorité des maîtres. La maîtrise du français n’est plus une exigence pour personne. Les savoirs fondamentaux s’effondrent, alors que les enfants ne sont pas plus bêtes qu’autrefois et que la grande majorité des enseignants fait preuve d'un dévouement méritoire. Le ministère de l’Education nationale, si mal nommé, car l’éducation est du ressort des parents, ne remplit plus correctement ses missions. L’ouverture massive des concours de professeurs, sans anticipation (il faut 5 ans d’études), conduit à une gestion déplorable des effectifs et à la baisse globale du niveau de recrutement.

Ces renoncements, ils se sont faits à l’égard des juges, des policiers, des pompiers, des infirmiers, des agents de la fonction publique qui se font insulter, caillasser, prendre à partie dans l’exercice quotidien de leurs fonctions. La prison n’est plus dissuasive, non plus que les peines pour les délits mineurs, comme le montrent les trop nombreux cas de récidive. Frapper « au porte-monnaie » serait sans doute plus efficace, du moins dans la plupart des cas.

On a renoncé aussi à certains mots qui sont devenus tabous. On ne parle plus « d’obéissance » mais de « consentement ». Il est pourtant une vérité éternelle, que nulle idéologie ne pourra effacer : les enfants doivent obéir aux adultes, et les adultes à la loi.

marianne-225x300Ces renoncements, ils concernent aussi le principe de laïcité, quand des responsables politiques flattent les intérêts des communautés religieuses, qu’elles soient catholiques, juives ou musulmanes, dans le seul but de récupérer leurs voix pendant les élections. Tel député souhaite publiquement un bon ramadan aux musulmans. Tel maire accorde des droits à des associations catholiques, sur crédits municipaux. Je prends des exemples tout proches, que certains d'entre vous connaissent bien.

Un véritable homme (ou femme) politique ne s’adresse pas à des communautés. Il s’adresse à chaque citoyen en tant qu'individu. Il s’adresse à sa raison, à son libre arbitre. Quelles que soient ses croyances, ses origines, ses préférences, ses aspirations. Nos rapports ne se définissent que de citoyen à citoyen. C’est ainsi que vit et vivra la République.

Certains se trompent de combat. Ils refusent de critiquer l’islamisme politique de peur de paraître racistes. Ce scrupule était autrefois le mien, mais il a complètement disparu le jour où des Maghrébins non pratiquants m’ont dit à quel point ils souffraient des pressions qui étaient exercées sur eux dans certains quartiers (intimidations et violences pour qu’ils n’aillent pas au café pendant le ramadan...) et que ce qui leur était autrefois permis ne l’est plus aujourd’hui. Ils m’ont dit que la République les avait abandonnés. Ces mots m’ont profondément touché et dans mon combat pour la laïcité je pense souvent à eux.

Ces renoncements, ils ont concerné les rites républicains, comme la suppression du service national obligatoire. C’était une erreur, car il est important, dans une société individualiste, que chaque jeune homme et chaque jeune femme consacre quelques mois de sa vie à son pays et comprenne ce que cela signifie de le défendre. Notre armée est un creuset social, comme l’école. C’est une armée professionnelle, solidement attachée aux idéaux républicains.

Ces renoncements, ils se sont faits à l’égard de la politique d’intégration. Bien sûr, il faut continuer à accueillir des étrangers sur notre sol. Bien sûr, ils doivent pouvoir accéder à la nationalité française. Le racisme est une forme archaïque de la pensée. Mais l’accueil des étrangers sans véritable politique d’intégration conduit à l’impasse et peut être source de graves tensions. Accepter, « tolérer » à nos côtés des personnes peu familières avec notre langue, notre histoire, nos valeurs, ce n’est pas accueillir. Le véritable accueil est une acceptation mutuelle et elle suppose une adhésion sans réserve aux valeurs constitutives de notre Nation : démocratie, laïcité, égalité hommes-femmes, liberté d’expression, droits et devoirs du citoyen, respect des biens et des personnes. On ne saurait transiger sur ces points-là. C’est au nom de ces valeurs que nous sommes attaqués, ce sont ces valeurs que nous devons défendre.

Ces renoncements enfin, ils touchent la morale en politique. Les responsables politiques doivent être exemplaires et irréprochables. C’est une exigence absolue. L’actualité, hélas, nous rappelle trop souvent à quel point c’est un vain mot. Les exemples sont trop nombreux pour être cités et la plupart d'entre eux, bien connus. Si l'on veut être ferme avec les délinquants, il faut l'être aussi avec les délinquants en cols blancs. Les citoyens n’ont plus confiance en leurs responsables politiques et l’on comprend bien pourquoi. Je voudrais leur dire : « si vous êtes honnêtes, si vous avez un peu de temps à consacrer aux autres, engagez-vous en politique ! Ne laissez pas les autres vous représenter si mal ! Vous critiquez la politique, mais elle vous appartient  à vous aussi, et pas seulement par votre vote. Il faut une nouvelle génération d’hommes et de femmes intègres, qui œuvrent avec honneur au bien de leurs concitoyens et s’engagent pour l’avenir de notre pays ! ».

Cet avenir, il nous paraît bien sombre, aujourd’hui. Que dire à nos enfants ? Qu’ils vivront dans la terreur ? Est-ce acceptable, alors qu’ils sont déjà tellement angoissés par la recherche d’un emploi, d’un logement, d'un projet de vie qui les rendrait heureux ? Mettre un terme à toutes ces renonciations serait un début. Construire une république conquérante, confiante, audacieuse, militante, serait un projet de société. Mais il faut du courage et une détermination qui s’affranchisse des cadres traditionnels de la politique où règnent les batailles d'ego et les clivages stériles. Une détermination forte, portée par des esprits équilibrés, fédérateurs et désintéressés, désireux de rallumer la flamme de la fraternité.

Frédéric Martin

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Commentaires
F
Je vous remercie pour votre commentaire et je comprends bien votre réticence à vous engager. Simplement, pour celles et ceux qui hésitent, je pense qu'il vaut mieux s'impliquer maintenant car plus tard, il sera trop tard.
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V
Beau discours, mais malheureusement déja lu des montagnes de fois et par des gens de gauche et de droite depuis des lustres. Vous dites: ne restez pas dans la critique, engagez vous en politique. Bien.tres bien. Mais quand on voit de pres comment ca se passe dans les partis on devient encore plus decouragé. Les dés sont pipés a la racine car la finance a deja gagné sur le politique et .... a tous les niveaux. Et les exemples a la tete sont minables l'age moyen des chefs tourne autour de 60 ans. Et l on voit Hollande avoir des cheveux qui lui poussent a defaut d idees nouvelles , et Sarko qui vient pour la revanche et Bayrou et Melenchon et..... tous plus de 60 ans. Et les jeunes politiques en france ils ont 40 ans!!! En GB ils ont deja passe la main ! Et leur comportement est souvent ceux de 'tueurs'. D ailleurs ne les presente t on pas ainsi pour mettre en valeur leurs qualités? Croyez vous que cela encourage a s engager en politique y mettre son ardeur,sa foi, son energie, dans un monde de predateurs ou l amitié n existe pas ou le reniement est l ordinaire?. Non merci !Il est de plus en plus probable que le'modele actuel se fracasse ou se pourrisse avec en plus une extreme droite aux affaires et un clivage societal maouss, pour que les citoyens reagissent. Souhaitons a ce moment la que les forces totalitaires de l argent sous des formes diverses, Chinoises ou autres, qui seront aux aguets, ne nous aient pas mangés pas tout crus. Alors l engagement sera necessaire urgent vital pour le pays des droits de l homme. Il ne sera sans doute pas suffisant mais souhaitons que des decouvertes scientifiques qui sont en train de bousculer les valeurs physiques etablies viennent a la rescousse. En attendant je pense que la lucidité la vigilance l'empathie et le partage sont deja un engagement citoyen
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Frédéric Martin - Engagement politique et citoyen
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